Page 33 - Sur un air militaire
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Chapitre IV
LES CAMPAGNES MILITAIRES
I - La musique et les conflits
Les périodes de guerre sont marquées avaient, entre autres missions, un rôle
par un répertoire musical (vocal et de guetteurs et signalaient les alertes
instrumental) spécifique. Aussi, les « aux gaz » d’une courte sonnerie
différents conflits dans lesquels la spécifique et facilement identifiable.
France a été impliquée ont été généra- Soufflant dans leurs instruments, ils
teurs de créations diverses. Elles étaient dans l’incapacité de mettre leur
apparaissent en réponse à des besoins masque à gaz et ne pouvait donc pas
opérationnels, d’évasion ou d’expression. se protéger des vapeurs toxiques. Il
Les productions instrumentales fallut donc trouver un autre moyen de
répondent à des circonstances bien signalement dont la sonorité serait
particulières et sont extrêmement caractéristique, d’un volume
codifiées. Le chant, beaucoup plus sonore élevé, peu fragile, commun et
libre, constitue la plus grande part de ne sollicitant pas les voies aériennes
ces créations. d’une personne. Il semblerait donc
que la crécelle se soit imposée pour
Un besoin opérationnel : Le tambour et relayer l’information. Le bruitage
le clairon sont les deux principaux supplanta alors la mélodie. L’esthétique
instruments d’ordonnance. Les capturer n’était pas la priorité, l’essentiel étant
(hommes et instruments) passe pour d’associer une série de sons particuliers
une humiliation, comme s’emparer d’un à cette alerte afin qu’il n’y ait pas de
emblème. Le tambour est apparu à la confusion possible avec un autre type
Renaissance dans l’armée. Il était plus d’information.
particulièrement présent dans les
troupes à pied dont le rythme de Un besoin d’expression : Les conflits
marche était cadencé par un battement ont inspiré des créations institution-
régulier. Un répertoire de batteries nelles qui valorisaient la vaillance et le
(association de différents rythmes) courage des soldats. C’est ainsi qu’une
permettait la transmission des ordres part des chants militaires fait référence,
donnés par le tambour-major. de façon explicite, à certaines batailles.
Ces pièces étaient également Souvent, ils sont étroitement associés
mélodiques en vue d’être interprétées aux unités ayant participé à ces
par des clairons dans l’infanterie. combats et sont considérés comme
Ces instruments, compte tenu de leur emblématiques et identitaires. Par
puissance sonore, permettaient de exemple, le chant La Sidi Brahim, écrit
couvrir le tumulte de la bataille et de par Pierre Dupont sur l’air de Buvons à
transmettre efficacement les ordres. l’indépendance du monde, après la
Jusqu’à la fin du premier conflit bataille de Sidi Brahim en Algérie, qui
mondial, ce système de communication s’est déroulée du 22 au 25 septembre
était encore en vigueur. C’est ainsi que 1845 entre les troupes françaises et
les clairons (les instrumentistes) Abd El-Kader, est l’hymne des
Partition du chant La ferme aux fraises , vers 1900 (17,5×27,2)
Coll. Musée du Sous-Officier, inv. 2009.0.18
Partition, en double page, du chant La ferme aux fraises, dont la musique est de Herpin et les paroles de
Villemer. La couverture représente un soldat prussien près d’une borne frontalière et d’une bâtisse. Cette
illustration fait écho au contenu du chant, imprimé sur les deux pages intérieures. Il relate la triste histoire d’une
femme française dont la ferme bascule en Allemagne, à la suite de la défaite de 1870. La quatrième page fait la
promotion des différentes publications de chansons militaires aux éditions C. Joubert, 25 rue d’Hauteville à Paris.
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